Programmer au musée ? Le code créatif comme matériau de médiation

Avec Jonathan Perret, nous avons imaginé un atelier inspiré par l’art génératif pour les 9-13 ans au Centre Pompidou : « Du code, des couleurs et des cookies ». Nous répondions à l’invitation de Odile Fayet et de Patrice Chazottes de proposer de nouveaux formats utilisant la programmation. Vous pouvez trouver tout le code et une partie des créations des enfants sur le Github de l’atelier.

Les enfants génèrent des images avec Processing, projetées par 12 vidéo-projecteurs sur les murs – oui, c’est 1 vidéo-projecteur par enfant !

Durant les 2 heures de l’atelier, les enfants et leur famille montent avec les animatrices à la rencontre de 3 tableaux de 1920 à 1955 que le code informatique nous fait, rétrospectivement, revoir autrement.

Grâce aux peintures, les jeunes programmeurs et leurs parents reviennent aussi avec des nouvelles idées : “On a essayé d’imaginer comment nous pourrions programmer les formes que nous avons vues dans les tableaux”.

En concevant l’atelier, nous avons repris la structure des ateliers du Centre, basé sur un mélange de phases de création active et de visite dans le musée. De la même manière que le papier ou la pâte à modeler peuvent-être utilisés pour tisser une relation avec le travail de grands artistes, le code peut être utilisé comme un matériau de base pour explorer différente type d’arts, et non pas uniquement l’art numérique.

Notre objectif avec cet atelier est d’introduire le code informatique comme un matériau universel de médiation de l’art. 

Le Centre Pompidou a une longue histoire avec l’art génératif, comme en témoigne la petite anthologie que j’ai collecté en bas de ce texte. Il était intéressant de ne pas utiliser ce mode de création de manière trop littérale.

C’est pourquoi les œuvres choisies sont des peintures de Kupka, Valensi et McDonald Wright, peintes entre 1920 et 1955.  On peut utiliser la photo pour approcher des sculptures, on peut utiliser le carton pour s’approprier le design de meubles… et le code pour créer une relation avec des peintures des années 1930 !

Un format pour ce musée

Au lieu de plaquer un format imaginé pour un autre contexte – atelier de programmation, cours de robotique, Coding Goûter – nous avons créé un format natif au lieu, ancré dans les pratiques du Centre Pompidou.

Nous sommes parti du contexte du Musée National d’Art Moderne, de ses collections, de son accrochage actuel, de ses ressources techniques, et de l’expérience pédagogique du service des publics dans la création d’atelier pour enfants.

Le format a été développé grâce à de nombreuses discussions avec les équipes. La participation avec nos enfants aux ateliers existants nous a permis de comprendre leur dynamique, leur fonctionnement interne et les motivations des animatrices. La sélection des œuvres à été l’occasion de réfléchir aux échos entre la peinture abstraite cinétique et l’art génératif contemporain. Nous avons travaillé avec Jonathan une journée complète dans l’espace même des ateliers – ce qui nous a amené par exemple à proposer des projections murales circulaire, une disposition en îlot.

L’intégration de deux animatrices à l’atelier, via une répétition générale le jour même et leur présence active lors de l’atelier, va permettre une appropriation progressive du code informatique comme un matériau supplémentaire pour les ateliers jeunesse du Centre, au côté du papier, des objets, de la photographie…

Une longue histoire entre le Centre et l’art génératif

En préparant cet atelier, j’ai eu l’occasion de lister quelques exemples de la longue histoire entre le Centre Pompidou et l’art génératif.

Adolescent, j’ai eu l’occasion de faire l’experience de la monumentale installation Genetic Images de Karl Sims installée à Beaubourg en 1993 : http://www.karlsims.com/genetic-images.html Cette photo est d’ailleurs probablement l’installation au centre lui même : http://www.karlsims.com/genetic-images.jpg dans l’espace qui est aujourd’hui juste après l’entrée du personnel. Genetic Images n’a été installé que 3 fois. Son installation au centre dans le cadre de la Revue Virtuelle en est d’autant plus significative.

Genetic Images sur le site du centre : http://www.cnac-gp.fr/cpv/ressource.action?param.id=FR_R-42b8c1e2d526d6ac561246cd26349f5&param.idSource=FR_E-42b8c1e2d526d6ac561246cd26349f5 Le Musée National d’Art Moderne possède aussi dans ses collections des vidéos de Karl Sims, à mi-chemin entre démonstration d’algorithme avancés de simulations et œuvres génératives. Elles sont visibles aux banques vidéo du musée.

Pour l’anecdote, le musée possède une œuvre de Casey Reas, créateur originel de Processing avec Ben Fry. Processing est le « language de programmation pour artiste » le plus populaire, et nous l’utilisons pour l’atelier http://www.centrepompidou.fr/cpv/ressource.action?param.id=FR_R-266d2bce1d4b9622c7be85e00278&param.idSource=FR_O-5d3c8e648686ddbc7c1e406c7456677f

Manfred Mohr est un des co-fondateur du séminaire “Art et informatique” en… 1968 à l’université de Vincennes (actuellement Paris 8) http://www.emohr.com/

Le Centre possède une œuvre de lui, relativement récente : http://www.centrepompidou.fr/cpv/ressource.action?param.id=FR_R-4b51c458b2e74e743914f264a1de112&param.idSource=FR_O-d3a3d092158097d96b8a9e1a68924fa3

Vera Molnár a commencé dès 1968 à créer des œuvres sur papier calculées par ordinateur. Au départ deux ordinateurs était nécessaire, un pour effectuer les calculs, et un second, dans un autre établissement, pour dessiner sur traceur les résultats obtenus. Les ordinateurs personnels n’existant pas en 1968, les calculs était fait sur des ordinateurs scientifiques. Les écrans graphiques n’existaient pas non plus, le traceur sur papier était donc le mode de rendu obligatoire. http://www.veramolnar.com/

Son travail des années 1960 et 1970 : http://dam.org/artists/phase-one/vera-molnar/artworks-bodies-of-work/works-from-the-1960s-70s

160 carrés poussés à bout est un ensemble de dessin sur ordinateur de 1976. Huit dessins de cette série sont conservés dans la collection du cabinet d’art graphique du Centre Pompidou : http://www.centrepompidou.fr/cpv/ressource.action?param.id=FR_R-c2f09c215b8ad68194d474c01d8cd1&param.idSource=FR_O-1a1e5a215fb6166a1c4abf90707c1a7c et ici : http://www.centrepompidou.fr/cpv/ressource.action?param.id=FR_R-2db6ac47ca795f81910e691d8596c7&param.idSource=FR_O-15ba268828b455b80a08b30d7f0b2c